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Jonathan Littell, homme de l'année
Le Figaro Magazine - Publié le 29 décembre 2006

FIGARO MAGAZINE. Vendu à plus de 600 000 exemplaires, «Les Bienveillantes» est un phénomène éditorial et sociétal qui dure. Entretien avec son auteur et enquête sur la signification de ce succès.

Un mois et demi avant la sortie de son roman chez Gallimard, l'écrivain américain de langue française Jonathan Littell accordait à La Revue littéraire (Editions Léo Scheer) un entretien inédit. Il y évoque aussi bien son itinéraire personnel - de ses passions adolescentes à son expérience dans l'humanitaire en zone de conflits en passant par l'influence de ses lectures de jeunesse -, que la genèse et les enjeux politiques, philosophiques et métaphysiques d'un livre écrit sous les auspices de la pensée grecque. Surtout, il s'explique en détail sur la figure à la fois fascinante, torturée et emblématique de son héros, l'officier nazi Maximilien Aue. Le Figaro Magazine en publie les principaux extraits.

Florent Georgesco - Un premier roman, bien souvent, est un leurre : il y en a trois ou quatre derrière. C'est la partie émergée du tiroir. Dans votre cas, on a l'impression contraire : «Les Bienveillantes» est un livre si monumental, et si étrange, qu'il donne l'impression d'être l'oeuvre d'une vie. On n'imagine pas qu'un homme de votre âge (vous avez 38 ans, sauf erreur de ma part) puisse écrire un tel roman sans y mettre toute son énergie créatrice.
Jonathan Littell - Et pourtant, ce n'est même pas le premier livre que je publie. J'ai sorti un roman de science-fiction aux Etats-Unis quand j'avais 19 ou 20 ans. Mais ça ne compte pas vraiment. C'était une commande pour une petite série assez merdique. A la même époque j'ai fait un scénario, une commande également. Je ne prenais pas ça au sérieux. Cela dit, techniquement, ce n'est pas un premier roman. C'est pourquoi j'ai refusé que Gallimard mette «premier roman» à l'arrière du livre. Nous sommes finalement tombés d'accord sur l'expression «première oeuvre littéraire», qui était plus juste.

Vous avez une expérience de la technique littéraire, narrative en tout cas, déjà ancienne...
Oui, en un sens. Ensuite, après la fac, entre 21 et 25 ans à peu près, j'ai pratiqué la traduction littéraire.

Qu'avez-vous étudié à la fac ?
Aux Etats-Unis, ce n'est pas spécialisé comme ici, j'ai fait un peu de tout : de l'art contemporain à la physique quantique en passant par la sociologie, le jazz... De la littérature aussi bien sûr, mais pas seulement.

Avant vos études, vous viviez en France.
Oui, je suis né à New York, mais je suis arrivé en France quand j'avais 3 ans. Je suis d'ailleurs reparti en Amérique entre-temps. J'y ai vécu entre 13 et 16 ans.

Pour l'essentiel, vous avez d'abord été formé en France, dans la langue française.
Oui, d'autant que de 13 à 16 ans, j'étais au lycée français de New York. Ensuite j'ai passé mon bac à Paris. Et après je suis parti à la fac...

Est-ce qu'à ce moment-là vous écriviez, en dehors de ces commandes et de vos traductions ?
Non, je ne savais même pas vraiment que ça existait. J'exagère un peu, mais je n'étais pas très calé dans ce domaine-là. Cependant, l'été où j'ai écrit ce petit livre de science-fiction, j'étais au Colorado, j'ai rencontré William Burroughs, et cela m'a ouvert de nouvelles dimensions. C'est un monsieur que j'aime beaucoup. Il m'a offert Le Festin nu. Il a lu quelques pages de mon bouquin. Il adorait la prose de série B. A partir de là j'ai commencé à lire tous les modernes, et à les traduire. J'ai traduit Blanchot, Genet, Sade... Mes traductions n'ont pas été publiées, d'ailleurs, sauf quelques lettres de Sade dans une revue littéraire. En fait, il était question d'en faire des livres, j'avais des éditeurs pour cela, et puis ça a capoté, on n'a jamais pu avoir les droits.

Qu'aviez-vous en tête quand vous faisiez ces traductions ? Vous imaginiez-vous mener, simplement, une carrière de traducteur, ou étiez-vous conscient de faire vos gammes en vue d'une oeuvre personnelle ?
J'avais envie écrire, mais je ne savais pas trop par quel bout prendre ça. J'écrivais de petites choses, un peu au hasard.

Dans quelle langue ?
Au début, c'était en anglais, et puis à un moment, pour des raisons diverses, je suis passé au français. Mais bon, de toute façon j'ai vite laissé tomber - c'était vers 1992...

Vous avez laissé tomber quoi ? Tout, traductions comprises ?
Oui. C'est là que je suis revenu en Europe. Au bout de six mois environ, j'ai été en Bosnie. J'ai fait de l'assistance humanitaire pendant sept ans. Sept ans de terrain...

Vous étiez dans quelle association ?
Action contre la faim. Mais purement par hasard. En fait je suis allé à Sarajevo en free lance. Je ne savais pas ce que je ferais. Je me baladais dans l'Europe de l'Est et puis je suis arrivé à Dubrovnik, où j'ai rencontré des gens qui m'ont dit : «Tu sais, c'est pas tellement compliqué d'aller à Sarajevo.» Je suis allé voir et j'ai compris que je ne pouvais pas rester là en touriste. Or, comme pour un certain nombre de raisons je ne voulais pas faire du journalisme, je me suis engagé dans la branche humanitaire. J'ai été recruté sur place. C'était fin 1993. A l'époque, les critères de recrutement étaient beaucoup plus souples qu'ils ne le sont maintenant, on prenait n'importe quel type qui était assez con pour venir à Sarajevo pendant la guerre... Maintenant, c'est très professionnalisé, il faut des formations, etc. Moi, j'ai été formé sur le tas. Je suis resté deux ans en Bosnie, jusqu'à la fin de la guerre, et j'ai enchaîné sur d'autres missions.

Cet engagement a donc correspondu à un arrêt durable de vos activités littéraires, quelles qu'elles soient - les textes personnels comme les traductions, les séries B ou les scénarios ?
Oui. Mais je continuais à lire beaucoup. C'est ça qui est bien dans les missions de guerre : on a du temps, on est planqué en permanence, il y a les couvre-feux, tout ça, on est enfermé à la maison. J'avais des piles de livres : surtout des Pléiades - les Pléiades sont ce qu'il y a de mieux dans ces circonstances, le rapport entre le nombre de pages et le poids est le bon, ça tient plus longtemps. J'ai lu énormément.

Mais aviez-vous renoncé à écrire, un jour ?
Oh, non... En fait, j'avais déjà l'idée de ce livre au fond de ma tête - depuis 1989.

Quelle était cette première idée du livre ? Comment vous le représentiez-vous ?
II y avait une photo sur laquelle j'étais tombé quand j'étais en fac. Je ne savais même pas ce que c'était à l'époque, je l'ai appris plus tard : le cadavre d'une partisane russe, une icône de la propagande soviétique de guerre, tuée par les nazis devant Moscou. On a retrouvé son cadavre à moitié nu et dévoré par les chiens. Dans le livre, je fais une brève description de ce cadavre-là, sans trop appuyer, en hommage à cette photo. A l'époque, ça m'avait beaucoup travaillé : le décalage entre la beauté de la fille et l'horreur de la scène, de ce cadavre dans la neige, déchiré par les chiens. C'est une photo atroce, mais qui est belle. Au départ, c'était axé sur ça, sur la guerre elle-même, en particulier sur le front de l'Est.

Et vous vous disiez que vous alliez en faire quoi ?
Oh... quelque chose...

Ce n'était pas encore une idée définie ?
Non.

Mais elle a traversé tout ce temps-là ?
Oui, il y a eu à peu près douze ou treize ans de réflexion avant que je commence vraiment à travailler. Pendant ce temps, des couches se formaient, certains blocs se mettaient en place. J'avais besoin d'accumuler le plus possible de ces couches, et qu'elles se décomposent, qu'elles s'interpénètrent, pour faire une sorte de compost. J'ai trouvé la structure fondamentale, inspirée d'Eschyle, de L'Orestie, en 1998. Jusque-là, j'avais de vagues notes, mais rien de systématique. A cette époque, j'ai pris six mois de break avec mon amie. On a fait un grand voyage en Asie centrale, au Pakistan, au Tadjikistan... et on est restés bloqués à Bichkek pendant trois semaines, dans des conditions un peu fatigantes... On attendait un visa iranien, ils ne voulaient pas nous le donner. Il n'y avait absolument rien à faire. On se promenait beaucoup. On avait le temps de réfléchir. C'est là que j'ai conçu le montage du livre.

Est-ce à ce moment que vous avez imaginé de prendre un officier nazi comme personnage central, et de lui donner la parole ?
Non, ça j'y pensais depuis le début. Ce qui est venu plus tard, c'est le fait de le situer au coeur des processus d'extermination. Comme je vous le disais, j'étais d'abord parti sur une idée de guerre. Mais après avoir travaillé un certain temps dans les guerres, je ne sais pas pourquoi, le projet a évolué vers les aspects bureaucratiques de l'extermination.

L'essentiel était alors en place : le personnage, la structure... Avez-vous commencé à écrire ?
Non, pas encore. Il est vrai que si avant 1998 je n'avais que des bribes, à partir de là je me suis dit : voilà, maintenant, je tiens le livre, je sais par quel bout le prendre. Seulement, on m'a offert un poste en Russie. Je devais m'occuper de prisons et d'orphelinats, c'était un poste très intéressant mais plutôt tranquille, qui permettait une vie normale. Ça a duré six mois : la guerre a recommencé en Tchétchénie, je suis reparti pour quinze mois de conflit, un peu contraint et forcé par les événements. Et puis, en 2001, j'ai dû arrêter de travailler. J'ai compris que c'était le moment de me mettre au livre. Je m'y suis consacré à plein temps. J'ai lu des centaines de bouquins, je suis allé sur le terrain... Mes recherches ont duré un an et demi à peu près.

Ensuite, l'écriture était possible...
Voilà.

Est-ce que, avant ces recherches, vous voyiez votre personnage, est-ce qu'il avait déjà pour vous quelque chose de concret, de précis, ou est-ce à travers cette recherche que vous avez pu le dessiner ?
Quand j'ai conçu la structure fondamentale, il avait... je ne dirai pas une existence psychologique, mais enfin, une existence de personnage. Par contre, il fallait que je l'inscrive dans une réalité historique déterminée. Je connaissais son ton, sa manière d'être, il me restait à préciser son environnement, son parcours, son CV si vous voulez.

C'est ce qui frappe dès le début du livre : le personnage s'impose d'emblée, par son ton justement. On a quelqu'un devant soi. Il y a la masse documentaire, qui est considérable, tous ces détails, cette restitution des faits, mais sa présence à lui l'emporte sur tout.
Le risque, c'était d'être noyé dans les faits. Je devais jongler avec tous les éléments que j'avais réunis et, en même temps, garder une unité d'un bout à l'autre. C'est pour ça que la première personne s'est imposée, comme une note fondamentale. J'ai essayé de maintenir cette tonalité.

Je crois que vous y êtes arrivé, et que c'est ce qui fait la force du roman, ce qui lui donne sa puissance d'attraction. On a d'ailleurs l'impression qu'il a été écrit d'une traite, en un souffle.
Oui, je l'ai écrit d'un coup, en quatre mois en fait, pour le premier jet. Je me disais : ça passe ou ça casse. Et ça a marché. C'est sorti d'un coup. Je m'étais complètement isolé, je ne voyais personne sauf mon amie et mon fils, et encore... Après j'ai passé quelques années à faire du nettoyage stylistique, mais l'essentiel était là. (...)

Que diriez-vous aujourd'hui de votre narrateur ? Quels sentiments éprouvez-vous face à lui ?
Il est difficile de dire du bien d'un aussi sale type...

Oui, mais vous avez vécu longtemps avec lui.
Je pourrais dire que c'est moi.

Et il y a des moments où il est difficile de dire du bien de soi...
Oui, bien sûr. Disons que c'est un moi possible, si j'étais né allemand en 1913 plutôt qu'américain en 1967. C'est aussi de cette manière que je l'ai abordé. Les gens ne choisissent pas forcément... Il y a beaucoup de moi dans ce type, à côté de beaucoup de choses qui ne sont pas de moi. Lui fait du nazisme avec autant de sincérité que moi j'ai fait de l'humanitaire. C'est un peu le propos du livre. Mais çça ne signifie pas que je l'innocente.

De ce point de vue, le fait qu'en un certain sens vous ne vous innocentiez pas, vous, l'innocente tout de même partiellement, lui : il n'est pas né en 1967, mais en 1913, c'est le hasard.
Oui, mais en même temps... L'influence de la pensée grecque sur le livre va bien au-delà de sa structure eschyléenne. J'aime beaucoup la façon qu'avaient les Grecs de penser la morale, qui est beaucoup plus pertinente pour essayer de comprendre ce genre de phénomène-là que l'approche judéo-chrétienne. Avec le judéo-christianisme, on est dans la faute, le péché, dans le jeu entre péché pensé et péché commis... L'attitude grecque est beaucoup plus carrée. Je le dis dans le livre : quand OEdipe tue Laïos il ne sait pas que c'est son père, mais les dieux s'en foutent : tu as tué ton père. Il baise Jocaste, il ne sait pas que c'est sa mère, ça ne change rien : tu es coupable, basta. L'intention n'entre pas en compte. C'est ainsi qu'on s'y est pris dans les procès d'après-guerre, et c'est la seule façon de le faire. Tel type a commis tel acte. Peu importe la raison qui l'a amené à le commettre. Qu'il ait été de bonne foi, de mauvaise foi, qu'il l'ait fait pour de l'argent ou parce qu'il y croyait, c'est son problème : il a commis cet acte, il va être jugé et condamné. C'est tout. Après, il y a des gens qui ont été exécutés, d'autres ont été emprisonnés, certains ont été relâchés, il y en a même qui n'ont jamais été arrêtés... Ce n'est pas juste. C'est comme ça. C'est le hasard des processus. ça n'a rien à voir avec la culpabilité.

C'est-à-dire que votre livre n'est pas un livre sur la culpabilité ou l'innocence. Ce n'est pas un livre sur la justice.
Non, en effet. Le narrateur le dit au départ : j'ai fait ce que j'ai fait, je ne suis pas là pour me justifier, je vais juste vous expliquer comment ça se passe. Moi, ce qui m'intéresse, c'est ça, c'est comment les choses se passent. Dans mon travail, j'ai souvent été obligé de dealer avec des gens semblables à lui : des assassins serbes, rwandais, tchétchènes, russes, afghans... Je leur serrais la main avec un grand sourire. C'est une question professionnelle : on est là pour obtenir ce qu'on veut d'eux, point. On ne les juge pas.

Mais en l'occurrence que vouliez-vous obtenir de votre personnage ?
Eh bien, de savoir comment ça se passe. Confronté à des types pareils, je n'arrive pas à comprendre comment ils peuvent faire ce genre de choses. Ils sont très bizarres, voire complètement délirants. Un jour, à Sarajevo, ma voiture se fait tirer dessus à coups d'obus. Le lendemain, je vais chez les Serbes me plaindre, je trouve un colonel que je connais qui me dit : «Vous n'avez pas le droit de prendre cette route, donc c'est bien fait pour vous. De toute façon, si j'avais voulu vous dégommer je vous aurais dégommé.» Après, on a une grande discussion, et il m'explique pourquoi il fait tout ça : «Avant, j'étais pêcheur à la ligne, et chez moi, à Sarajevo, j'avais pour 20 000 marks d'appâts. Ces sales bougnoules, ils ont pillé mon appartement, ils ont piqué tous mes appâts.» Et ce type, ça faisait trois ans qu'il bombardait Sarajevo, qu'il snipait les gens... Pour une histoire d'appâts...

Le narrateur, lui aussi, se retrouve pris dans le processus d'extermination d'une façon arbitraire, et absurde. Sa première intention n'est pas de massacrer les gens.
Non, pas du tout ! Au départ, ce n'est pas un salaud, c'est plutôt quelqu'un de bien. Il dit à un moment, à peu près : «Qui aurait pu s'imaginer qu'on prendrait des juristes pour assassiner des gens sans procès ? Moi quand je me suis engagé là-dedans, je ne pensais pas du tout que c'était pour ça.» Et puis après... Il a fait ce qu'on lui a dit de faire. C'est malheureux, mais c'est comme ça. C'est un garçon obéissant. Moi, je ne le suis pas, j'aurais peut-être eu un réflexe de refus, je ne sais pas. Mais lui, il est dans sa logique à lui.

Maintenant que vous avez fait tout cet énorme travail, et que vous êtes entré dans la vie de cet homme, avez-vous le sentiment de mieux comprendre ?
Oui et non, ce n'est pas une compréhension intellectuelle, mais... D'une certaine manière, j'ai éprouvé les choses.

Vous êtes passé par le chemin qu'il a suivi.
Oui, mais ça reste de la fiction. Ce type est hors normes à bien des égards. La plupart de ceux qui étaient là-dedans étaient des amoraux complets, qui ne se posaient pas de questions, contrairement à lui. Mais avec son regard lucide à l'intérieur de la machine, il me permettait d'observer les autres, de disséquer tous les types de bourreaux qui étaient autour de lui. Cela dit, vous savez, ça ne change rien. Ce n'est pas parce qu'on comprend mieux qu'on va empêcher les Américains de faire des saloperies - qui ne sont pas comparables à celles dont je parle dans le livre, mais qui sont quand même de grosses saloperies. Parce que, non seulement ils ont la puissance, mais ils ont des armées de juristes, des gens qui ont fait de meilleures études que moi et qui touchent des salaires faramineux pour expliquer que les tortures, les emprisonnements arbitraires, et tout ça, sont légitimes. ça n'a pas le même sens que dans la situation de mon narrateur, mais ça s'en rapproche.

Comprendre ne sert à rien ?
Si, mais après, il y a la politique, le social, et le social c'est la masse. La masse ne va pas forcément dans le bon sens. Aux Etats-Unis, elle vote une deuxième fois pour Bush, parce qu'elle l'aime bien, elle se reconnaît en lui, quoi qu'il fasse. Il est religieux, il croit en Dieu, tout va bien. Qu'est-ce qu'on peut contre ça ? Moi, simplement, je pars vivre à l'étranger.

Propos recueillis par Florent Georgesco - Photo by Ceccarini - © Le Figaro

En attendant l'éventuelle rédaction d'un nouveau roman, Jonathan Littell publiera en mars un livre de conversations avec son éditeur Richard Millet dans la revue «Le Débat».

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